Radjoul Mouhamadou : Noircir le cahier de mes détours par l’archipel des Antilles m’a dérouté du retour à l’origine. En lorgnant les méandres de l’« estuaire des Amériques », j’ai découvert une pensée en archipels, qui dispense d’une origine-racine et se dépense sans compter en relation. Cette exploration géopoétique m’a convaincu de renoncer au « paradigme de l’identité », attachée à une certaine (ethno)philosophie africaine de compensation, pour revendiquer celui de la traversée qui assemble à la fois l’« Atlantique noire » (Paul Gilroy), les « théories caraïbes » (Joël Des Rosiers), l’« afropolitanisme » (Achille Mbembe) ou le « Tout-monde » (Édouard Glissant). Après les éclairs de la poésie d’Aimé Césaire et les foudres de la pensée de Frantz Fanon, les Antilles d’après Édouard Glissant font une offrande vertigineuse au monde, celle du paradigme de l’archipel, dont la relation est l’unité de mesure.